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Elections au Kenya : des candidates face à la violence

Cristina Krippahl | Carole Assignon
4 août 2022

Les attaques verbales ou physiques et le manque de soutien de la gente masculine constituent un frein à l'engagement des femmes en politique au Kenya.

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Deux femmes siflés en bouche dénonsent les violences basées sur le genre.
Des femmes siflés en bouche disent non aux violences basées sur le genre.Image : Monicah Mwangi/REUTERS

Le 9 août,  les électeurs doivent se rendre aux urnes au Kenya pour élire un nouveau président et un nouveau parlement. Mais les électeurs n’auront pas beaucoup de choix parmi les femmes. Elles sont en effet, comme c’est souvent le cas ailleurs, peu à faire de la politique. Et celles qui choisissent tout de même de s’engager, subissent des violences psychologiques mais aussi des agressions physiques. 

"Les gens disent" nous voulons  des femmes en politique , nous voulons que plus de femmes obtiennent des sièges politiques. Mais comment vont-elles les obtenir si elles sont humiliées ?". Cette question, c'est Liz Njue qui la pose.  

Lorsque cette psychologue kenyane de 39 ans a voulu briguer un siège à l'Assemblée nationale, elle a été agressée physiquement. 

Liz Njue est l'une des dizaines de candidates qui ont été agressées lors de la campagne pour les élections du 9 août 2022, selon l'Association parlementaire des femmes du Kenya, Kewopa.

De quoi décourager

Mary Mugure, une ancienne travailleuse du sexe, a par exemple reçu, elle, des appels téléphoniques et des SMS menaçants alors qu'elle se présentait à une assemblée de comté. 

Outre les attaques verbales et physiques, les agresseurs utilisent également les réseaux sociaux. C’est ce qui est arrivé à Esther Passaris, qui représente le comté de Nairobi. Quand elle a publié un hommage à son défunt père, elle a reçu des commentaires désobligeants. 

La candidate Mary Mugure parle en faisant des gestes avec ses mains.
Mary Mugure candidate et victime de violences.Image : Monicah Mwangi/REUTERS

Selon la coordinatrice du programme Kewopa, Mercy Mwangi, les femmes signalent une augmentation d’attaques en ligne, notamment du sexisme, de la misogynie et des images humiliantes. 

Une situation qui explique  la réticence des femmes à s'engager politiquement mais il y a aussi le fait que les politiciens hommes ne semblent pas non plus prêts à leur céder la place. 

En 2018, ils ont par exemple mis de côté un vote parlementaire qui aurait garanti aux femmes, un siège sur trois à l'Assemblée nationale. Depuis lors, aucune autre tentative de promouvoir l'égalité entre les sexes au Parlement n'a été faite.

 Des résistantes

En dépit d'une situation qui n'avantage pas les femmes,Susan Gitari, qui se présente dans le comté d'Embu, veut tout de même rester optimiste.  

"On monte, mais ce n’est pas encore suffisant. Alors j'encourage de plus en plus de jeunes femmes à se présenter aux postes électifs parce qu'on peut, oui, on peut !," assure t-elle. 

Martha Karua s'exprime au micro avec un bras levé.
Martha Karua colitière de l'opposant Raila Odinga qui a fait le choix d'avoir une femme à ses côtés.Image : Thomas Mukoya/REUTERS

La sœur de Susan Gitari, Mercy Wambui, qui gère sa campagne, espère aussi que les choses commencent à changer. "Nous avons reçu un très bon soutien de la part des personnes qui la comprennent et qui ont eu une brève histoire à son sujet et qui connaissent ses capacités" précise t-elle. Deux des quatre candidats à la présidentielle ont par exemple choisit des femmes comme colistières.

Certaines comme Susan Gitari ne renoncent donc pas. C'est aussi le cas de Umra Omar qui dirige Safari Doctors, une association caritative qui prodigue des soins médicaux gratuits aux habitants des villages les plus reculés. Cette militante est candidate au poste de gouverneur du comté de Lamu pour le parti Safina.  

Et elle le martèle : le Kenya a besoin de femmes au sein des sphères de prise de décisions sur des questions qui affectent le quotidien et le futur du pays. Elle n’hésite pas à parler de sa propre expérience.

"La meilleure façon dont mon travail m'a préparé à entrer dans l'arène politique a été la connectivité, être sur le terrain et être originaire de cette région qu'est Lamu, avoir mes parents là-bas, avoir ma grand-mère là-bas et avoir mes deux enfants qui grandissent ici aussi, et être très, très étroitement liée aux problèmes sur le terrain", explique la candidate. 

Si elle est élue, Umra Omar deviendrait la première femme gouverneur de Lamu. Actuellement, seuls trois des 47 gouverneurs de comté du Kenya sont des femmes.   
 

Cristina Krippahl Redakteurin
DW Französisch Carole Assignon
Carole Assignon Journaliste au programme francophone de la Deutsche Welledw_afrique