La démocratie dans tous ses états
8 mai 2019Le 8 mai 1945, rappelle la Süddeutsche Zeitung, marqua la fin de la guerre et de la tyrannie nazie. Et c'est aussi un 8 mai, quatre ans plus tard et alors que le pays était encore en ruine et divisé, que les parlementaires adoptèrent la "Grundgesetz", la Loi fondamentale allemande, qui est à la base de la démocratie allemande contemporaine.
Aujourd'hui, les premières lignes de la constitution: "la dignité de l'être humain est intangible" résonnent comme une évidence. La Loi fondamentale a fait de l'Allemagne un autre pays, capable de tirer des enseignements du passé, elle est aussi un bastion de la liberté en temps de crise et de radicalisation politique.
Néanmoins, souligne la Süddeutsche, le danger arrive lorsque la société tient pour acquises les valeurs de la constitution au point de les ignorer délibérément.
Le journal cite comme exemple la tentation de réduire les libertés individuelles au nom de la sécurité ou la menace grandissante liée aux technologies numériques. Mais aussi l'attitude de citoyens qui prennent la constitution pour une liste de souhaits et l'Etat pour celui qui doit les accomplir.
Erdogan fait sauter les derniers verrous de la démocratie turque
À propos de l'annulation du scrutin municipal à Istanbul, le Kölner Stadt-Anzeiger tente une explication. Si Erdogan perd le contrôle d'Istanbul, cela aurait inévitablement des conséquences sur sa position au sein de son parti, l'AKP, explique le journal.
Nombreux sont ceux pour qui le style avec lequel Erdogan dirige son parti et le pays est devenu insupportable. Ses ambitions d'islamisation de la société turque sont également de plus en plus contestées. La perte de voix de l'AKP dans les grandes villes montre qu'une grande partie de la population refuse de se voir imposer un style de vie islamo-conservateur, croit savoir le quotidien.
Pour die tageszeitung, Erdogan a dépassé une ultime limite. On ne pouvait déjà depuis longtemps plus parler d'élections justes en Turquie parce que le gouvernement contrôle l'ensemble des médias et qu'il a recouru à toutes les ressources publiques pour sa campagne, mais jusqu'ici au moins, le vote lui-même avait été préservé.
Cela appartient désormais au passé, Erdogan a fait voler en éclat les derniers verrous de la démocratie. Le message est clair : si un résultat électoral menace directement son pouvoir ou ses intérêts matériels, il en est fini de la démocratie formelle en Turquie.
Il est tout à fait possible que l'annulation de l'élection nuise davantage qu'elle ne profite à Erdogan et à son parti, analyse pour sa part la Frankfurter Allgemeine Zeitung. Les partisans de l'opposition sont plus mobilisés que jamais.
La pression internationale va encore s'accentuer et les pertes de la lire turque en sont déjà un signe. Et si les premiers systèmes de défense russes sont stationnés dans le pays à partir de l'été, le fossé entre la Turquie et ses "partenaires" occidentaux sera encore renforcé.